Un parcours tourné vers le handicap, un management orienté sur le collectif, Isabelle Donati nous parle de sa structure, de ses challenges du quotidien et de sa vision des évolutions du secteur social et médico-social.
Pouvez-vous nous présenter votre structure, les services proposés et le poste que vous y occupez ?
Je suis directrice de site au sein de l’Adapei de Haute Loire depuis 2004, pour 4 établissements/services et un effectif de 150 salariés répartis en plusieurs équipes distinctes :
- responsable du SPMS (Service de Prestations Médico-Sociales) comprenant un IME (accompagnement médico-social d’enfants souffrant d’autisme ou de troubles des apprentissages dans le cadre d’un accueil personnalisé en journée, en complément de scolarité à temps partiel en milieu ordinaire) et un SESSAD (accompagnement médico-social individuel d’enfants souffrant aussi d’autisme ou de troubles des apprentissages, en milieu ordinaire et à domicile)
- missionnée depuis 2012 sur la réorganisation d’un site comprenant un FAM (hébergement permanent d’adultes déficients intellectuels nécessitant des soins spécifiques) et un EEAP (hébergement permanent et en accueil de jour pour enfants polyhandicapés). Il s’agit d’une conduite de changement visant la mise en conformité de ces établissements du point de vue tant de leur organisation que des locaux et des pratiques professionnelles
- chargée du pilotage d’un dispositif associatif transversal : il est incarné par le positionnement de management transversal ayant pour mission, sous l’autorité du Directeur Général et en lien avec les autres directeurs de sites concernés, de définir, organiser et mettre en œuvre les orientations associatives ainsi définies en faveur des personnes, enfants ou adultes, souffrant d’autisme ou de troubles psychiques.
Quel est votre parcours ?
J’ai exercé en tant qu’éducatrice spécialisée pendant 14 ans (jusqu’en 2001) en secteur enfant à l’AFIPAEIM (38) en internat, IME/SESSAD et centre d’accueil familial spécialisé. Je me suis alors spécialisée dans l’accompagnement des personnes autistes en commençant par le premier D.U. sur l’autisme et troubles associés sous la direction du professeur Hochman, puis d’autres formations complémentaires, aujourd’hui recommandées par la HAS.
Par la suite, j’ai suivi une formation de chef de service qui m’a permis d’orienter ma carrière vers le management de structures médico-sociales et de projets de développement. J’ai ainsi pu m’investir de 2001 à 2004 dans la professionnalisation d’un service d’accompagnement au sein de l’association ALHPI à Grenoble (38), en créant un SAVS pour personnes handicapées psychiques. Un Service d’Accueil de Jour a aussi été créé sur la base de médiations artistiques en matière de réhabilitation psycho-sociale pour ces personnes qui étaient encore trop fragiles pour accéder au monde du travail.
L’heure de la première expérience de direction d’établissement et service est arrivée en 2004, avec la création du SPMS. L’Adapei de la Haute-Loire a su m’accorder sa confiance pour l’implantation de ce projet dans une logique de travail en réseau, impliquant des partenaires, des professionnels et chaque famille dans le projet singulier de chacun des enfants accueillis et accompagnés. L’enjeu de cette évolution de mon parcours professionnel était, au-delà de la dynamique de création, de faire vivre et évoluer un dispositif et ses acteurs dans le temps. Cette expérience dure depuis 11 ans : elle est venue s’enrichir de missions spécifiques confiées par l’association telles que décrites plus haut.
Quels sont les plus grands challenges de votre mission ?
Dans la conjoncture actuelle, les enjeux de ma mission sont de veiller au développement continu de la qualité de service rendu aux usagers.
Certes, l’heure est aux restrictions budgétaires, mais dans le secteur du handicap il reste encore possible d’innover et de trouver des marges d’optimisation. Il s’agit de fédérer un esprit d’équipe et de créer les bonnes conditions d’exercice des compétences en présence. L’implication personnelle de chacun des acteurs est impactée par l’objectif de développer un esprit collectif et de dégager la meilleure valeur ajoutée possible au sens de la valorisation et de la reconnaissance qui en résultent.
Un projet en particulier à nous présenter ?
Le dernier challenge qui m’a été confié par et aux côtés de l’association est une conduite de changement structurel et d’envergure . Je l’ai appréhendé comme un processus de résilience collective. Mobiliser la contribution d’une équipe ne se décrète pas. L’enjeu est la valorisation et la reconnaissance de la place de chacun, qui nécessitait d’être définie, comprise, incarnée et lisible par tous à l’interne comme à l’externe. De l’orchestration des compétences et de l’harmonisation des pratiques professionnalisées dépendait l’amélioration de la qualité du service rendu aux usagers, enfants comme adultes. Un enjeu essentiel a été d’aborder la mission de chacun sous l’angle du sens et de la responsabilisation de chacun, autour d’un objectif connu et vecteur d’implication. De l’efficience pourra encore être gagnée dès lors que chaque professionnel aura retrouvé une meilleure lisibilité des contours de sa mission et des résultats attendus.
Pourquoi avoir choisi la formation DEMS ?
C’est la dimension méthodologique du management stratégique qui a motivé mon choix de formation chez Espace Sentein. Si j’ai toujours abordé la gestion des forces vives d’une organisation avec une vision stratégique et prospective, mon approche empirique a pu donner l’impression d’un management fédérateur mais parfois aussi, par certains de ses effets, soit intuitif, soit directif. Dans ce contexte j’ai pu créer les conditions d’un travail d’équipe constructif avec des professionnels sensibilisés, consciencieux et attentifs aux enjeux internes et externes.
Mais face à des équipes plus conséquentes, une plus grande rigueur s’est imposée. Les modèles managériaux et les outils que nous avons pu approcher par les enseignements ou lors des visites dans des secteurs diversifiés de l’entreprise ont trouvé leur transposition concrète dans un quotidien de manager. Les évolutions des politiques sociales et du contexte réglementaire et juridique nous obligent à une approche qui ne souffre plus les approximations et les déclarations de bonnes intentions. L’obligation de résultat a succédé aux obligations de moyens. Ainsi la logique d’évaluation et d’analyse stratégique a été très prégnante tout au long du cursus DEMS (Dirigeant de l’Economie Médico-Sociale), comme un fil rouge accompagnant tout process et méthodologie à mettre en œuvre.
Comment les évolutions du secteur affectent-elles votre métier au quotidien ?
Les évolutions du secteur changent surtout la manière de considérer l’usager, avec ses droits, ses devoirs et ses aspirations.
Globalement, elles posent l’exigence comme un gage de qualité du cadre institutionnel mais également comme une reconnaissance formalisée des efforts fournis. Dans le champ du handicap, des marges de progression existent, les innovations restent possibles et les expérimentations sont encouragées.
Il est important de se tenir au fait de ces évolutions voire même d’y participer plutôt que de les subir. Elles prendront sens et seront d’autant plus aisées à accompagner auprès des équipes.